Les familles s’entredéchirent devant le notaire. Nos terres soudain, ce sont mes terres. Je lis : Constitution de servitudes, avancement d’hoirie et partage. Ce n’est pas le français que je parle d’habitude. Je n’y comprends rien. Ce sera ma première fois devant notaire, la semaine prochaine.
Je lis :
De nouveau, M. Baillehache intervint. Et il leur expliqua que c’était un compte à faire, les gages d’un côté, la nourriture et l’entretien de l’autre. Il avait pris une plume, il essaya d’établir ce compte, sur leurs indications. Mais ce fut terrible. Françoise, soutenue par la Grande, avait des exigences, estimait son travail très cher, énumérait tout ce qu’elle faisait dans la maison, et les vaches, et le ménage, et la vaisselle, et les champs, où son beau-frère l’employait comme un homme. De leur côté, les Buteau, exaspérés, grossissaient la note des frais, comptaient les repas, mentaient sur les vêtements, réclamaient jusqu’à l’argent des cadeaux faits aux jours de fêtes. Pourtant, malgré leur âpreté, il arriva qu’ils redevaient cent-vingt-six francs. Ils en restèrent les mains tremblantes, les yeux enflammés, cherchant encore ce qu’ils pourraient déduire.
Emile Zola, La terre.
Quand il est question d’argent, chez les paysans de Zola, il n’est plus de lien familial qui tienne. J’en tremble : la semaine prochaine, les sommes en jeu, c’est un peu plus que cent-vingt-six francs.
Je lis : un nom, qui m’était jusqu’alors inconnu, Elise Francey, veuve de Benoît. Mon arrière-arrière-grand-mère. Elle achète la maison. La même que la semaine prochaine…
