Le cerveau pense-t-il au masculin, livre à peine entamé, étude sociolinguistique à propos des représentations sexistes, que nous examinerons plus tard. Mais déjà cette question : mon cerveau lit-il au masculin ? Question biaisée : me reconnaissant moi-même de genre masculin, il va de soi que mon cerveau lit au masculin. Mais poussons néanmoins la réflexion : mon cerveau lit-il différemment un livre écrit par une femme et un livre écrit par un homme ? Lecture en cours : Laura Vazquez, La semaine perpétuelle. Livre de femme ? Voix de femme dans ma tête quand je lis ? Oui et non : quand je lis, la voix dans ma tête, c’est ma propre voix, ou c’est la voix du personnage – Salim, Sara, Jonathan, la grand-mère qui, mourante, ne parle plus, le père, le collocataire – ou c’est la voix de l’auteure, l’accent marseillais de Laura Vazquez, ces micro-vidéos disparues de YouTube, et en même temps que c’est la voix de l’auteure, je la vois, l’auteure et je ne peux – réflexe masculin – qu’y associer des stéréotypes, je ne peux que penser, sans oser me le dire consciemment, que Laura Vazquez est mignonne, vieux réflexe de vieux mâle, alors que le roman de Laura Vazquez, au fond, qu’il ait été écrit par une femme ou par un homme, là n’est pas l’essentiel, l’essentiel, c’est que les mots, dans ce roman, vous explosent constamment à la figure, l’essentiel, c’est la force, l’énergie, la violence des voix. Force, énergie, violence : trois noms féminins associés à des stéréotypes masculins. Mon cerveau, lisant Laura Vazquez, apprend à se foutre de penser au masculin.